Inspiration : Erika ” Voyager avec un enfant, c’est possible.”

Voyager avec un enfant, cela semble tellement fou pour certains… Cette année, j’ai eu 25 ans. Et lorsque je parlais de mes voyages, j’ai souvent entendu cette phrase: “Profite, quand tu auras des enfants, ce sera différent.” Comme si le fait d’avoir un enfant changeait radicalement nos plans, rendait impossible tous nos projets personnels voire pire, marquait la fin du bonheur tel qu’on le conçoit aujourd’hui.

Et puis, j’ai lu ce récit d’Erika sur mon compte instagram : “[Mon fils], je l’ai trimballé depuis ses 2 ans en voyage partout, seule, en tête à tête, en couchsurfing ou en camping à la roots. Je ne sais pas ce qu’est un enfant capricieux ou qui chouine. Beaucoup de dialogue, de réflexion, d’échanges, d’écoute et d’humilité. Je  l’ai élevé mais lui m’a enseigné et appris bien plus que quiconque.”  Et là, quelque part, une lueur s’est allumée en moi. Il fallait absolument que j’en sache un peu plus sur son histoire ! Voici l’origine de cet article… Car qui sait? Peut-être que je pourrais prononcer la même chose d’ici quelques années. En attendant, je réponds qu’on verra bien.

1 – Merci d’avoir accepté mon invitation. Pour commencer peux-tu te présenter ?

Je m’appelle Erika, je suis française, j’ai 43 ans et je vis à Barcelone depuis 1997. J’y suis arrivée à la base pour faire mes études. Je suis devenue maman en Juin 2000. Après avoir travaillé pour la région Rhone-Alpes à Barcelone, je travaille depuis 2016 dans une entreprise catalane spécialisée dans la protection contre la foudre. Je suis en charge du développement commercial à l’export, principalement avec les pays francophones d’Afrique.

 2 – Comment t’es venue l’idée de voyager avec ton fils ? Est-ce que tu voyageais avant ?

Petite, je ne voyageais pas loin avec mes parents mais tous les week-ends, on partait en randonnée où à la découverte de villes et villages de la région où on vivait. En été, on allait à Cambrils en Espagne où mes parents nous emmenaient en visite ou balade. J’ai également fait avec ma mère et mon frère des voyages dans les châteaux de la Loire, la Tunisie ou l’Union soviétique à l’époque. Donc le gout de la bougeotte, de la découverte ou de la curiosité me vient depuis petite. Avant d’être maman, j’étais en couple avec un garçon qui adorait voyager et avec qui j’ai fait de nombreux voyages.

2 ans après la naissance de mon fils, lorsque je me suis séparée du papa, j’ai décidé de revenir à mon essence. Ainsi, j’ai choisi que mon fils s’adapterait à moi et non moi à lui, toujours bien sûr, dans le respect de ses besoins ou horaires. Par exemple, j’ai décidé que les week-ends ou les étés ne seraient pas seulement pour lui mais bien pour nous. C’est ainsi que j’ai commencé à voyager avec lui dès l’été suivant. D’abord dans des destinations faciles d’accès car je n’ai pas de voiture, mais avec l’intention de lui apprendre la découverte du monde et des autres.

Les voyages plus importants commencent à ses 6 ans, quand il me demande s’il peut pour ses anniversaires demander une ville plutôt qu’un jouet. Les 2 premières années des compromis personnels ont fait que ça soit Disney et Asterix… mais dès 2008 on a commencé à réaliser son voeu. 4 jours dans la ville de son choix en Europe et les étés, 3 semaines en voyage.

Mes vacances ont toujours été quelque chose d’important, et je les ai maintenus même si dans l’année je devais renoncer à quelque chose. Choisir c’est renoncer et je choisis toujours les voyages. En revanche, je n’ai jamais voyagé non-stop sur une longue période. Pour moi, les voyages c’était surtout durant les vacances scolaires.

3 – Quels sont les pays qui t’ont le plus marqué ou que tu as préféré ? Pourquoi ?

Je n’aime pas parler de préférences, pas plus que je ne parle de défaut ou de qualité d’une personne. Je crois plus en des traits de personnalité plus ou moins compatibles avec chacun. Pour les voyages, il en est de même. Je ne compare pas car je crois que tout pays, toute ville a quelque-chose. En revanche oui, il y a des pays et des voyages qui m’ont marqué pour différentes raisons. Essentiellement un, c’était en 1996, vers mes 20 ans, je suis partie 5 semaines, sac à dos sur les épaules pour parcourir la Syrie et la Jordanie.

La Syrie m’a subjugué. Je suis tombée amoureuse de ce pays et de ces gens, et je crois que cela a changé dès lors mon rapport à l’autre. J’ai découvert la générosité, l’amabilité de son peuple, le don de soi totalement désintéressé, un sens de l’accueil unique, des paysages à couper le souffle, des villes uniques. J’avais fait des rencontres magiques sans parler un mot de leur langue… Je te laisse imaginer la tristesse que je ressens quand je vois ce qu’il s’y passe actuellement.

Depuis les voyages avec mon fiston ont tous été importants mais je citerai la Croatie pour les 7000 km parcourus car c’était le premier long voyage en condition itinérante (tente…) ou encore les Etats-Unis pendant plus d’un mois sur la Côte Est en bus pour ses 15 ans et mes 40 ans.

4 – Comment t’organises-tu au quotidien (niveau budget etc) ?

Pendant l’année, Pol va à l’école (enfin cette année il ira à la fac) et moi au travail normalement. Les week-ends, on part dans la région ou les environs de Barcelone. Je dois dire que même 20 ans après je découvre toujours de nouvelles choses.

En Espagne, le smic est très bas et l’école chère. Donc dans l‘année, j ai toujours été rik-rak et j’évite tout le superflu. J’ai donc beaucoup voyagé en couchsurfing.

En outre, en Espagne les impôts te remboursent le trop perçu à la source. C’est ainsi que tous les ans en Juin, quand je percevais cette somme, je partais en voyage. Je n’ai jamais songé à la mettre de côté « au cas où ». La vie c’est maintenant, donc cet argent nous servait pour nos voyages.

De plus, cela fait quelques années que j’accueille du monde à la maison pour dépanner. Quand ces personnes décident de rester vivre un temps à la maison, ils contribuent aux charges, à une partie du loyer… Cet argent me permet également de préparer mes projets voyage.

J’ai toujours dit “Je pars en voyage avec Pol” et non pas “J’amène Pol en voyage”.

5 – Comment les autres réagissent à ton mode de vie (ta famille, tes amis, les inconnus) ?

Ma famille a parfois du mal avec mon mode de vie assez « maison bleue » ouverte en permanence. Il y a toujours du monde à la maison et là-dessus, je sais que c’’est différent de leur nature.  Les amis de mon fils, quand il était plus jeune, hallucinaient de notre côté auberge espagnole. Les amis ou les inconnus sont toujours surpris car ça n’est pas fréquent, mais il n’y a pas trop de jugement.

Quant a mon mode de voyage, j’ai plus de leur part des remarques du genre « Si j’avais les moyens », « Cela se voit que tu n’as qu’un môme ! », « Attends de voir si plus tard, il ne va pas te dire que ça l’a gonflé de ne pas se reposer en vacances. », « Et tu dors chez des gens que tu ne connais pas ? Avec un enfant, ça craint quand même.”

Mais avec l’âge, j’ai appris à vivre et à laisser vivre. Je respecte et comprends qu’on ne veuille pas la même chose… mais je leur dis souvent : “Je ne t’impose pas de vivre à ma façon”. Cette année, mon fils a eu 18 ans et cet été il est parti en voyage avec sa chérie, en sac à dos, trois semaines dans les Cyclades. Comme quoi les chiens ne font pas des chats.

6 – Ces voyages ont-ils changé ta relation avec ton fils ? Si oui, de quelle façon ?

C’est une excellente question. Je ne sais pas si cela a changé quelque chose puisque cela a toujours été ainsi pour nous. Mais je pense que cela a conditionné notre relation, même si pour le savoir réellement il faudrait revenir en arrière et faire le contraire pour voir.

Mais je pense que le temps passé avec lui, nos semaines sur les routes, dans les bus locaux, les avions, sous la tente ou à vivre en communauté depuis tout petit a joué un rôle dans ce qu’est notre relation actuellement mais également, dans sa relation à lui et aux autres. J’ai toujours dit “Je pars en voyage avec Pol” et non pas “J’amène Pol en voyage”. A la maison, il n’a jamais eu de luxe matériel mais il a compris l’essence. On est riche de qui on est, de nos rencontres et non de ce que l’on possède.

Cet été lors de sa première semaine en Grèce, il m’a envoyé un message pour me remercier de toujours avoir mis un point d’honneur à partir en vacances et a toujours avoir donné la sensation que c’était facile. On est très complice mais en même temps très indépendant l’un et l’autre. Je crois que mon mode de vie finalement naturel et non étudié a joué un rôle sur notre confiance et complicité.

7 – Est ce que les voyages t’ont fait développer des valeurs dans ta vie? Lesquelles ?

Autre excellente question. Je pense que oui. Ca m’a beaucoup aidé à ne pas juger et à ne pas considérer que différent veut dire meilleur ou pire. Juste différent. Le fait de vivre à l’étranger en tant que française me fait aussi accepter de ne pas juger un pays selon le prisme de “oui mais chez nous au moins…” . Ca m’a beaucoup appris aussi le lâcher prise et à me concentrer sur l’essentiel de la rencontre et non pas sur le fait que la maison soit super ordonnée ou pas.

8 – Si tu devais donner un conseil aux personnes qui lisent ceci et veulent partir voyager avec des enfants, que dirais tu ?

Qu’ils le fassent ! Car qui veut peut. Tout peut s’adapter à son budget, à ses goûts et se modeler. Mais seuls les voyages font qu’à ton retour tu sois plus riche qu’à ton départ.

Merci Erika d’avoir partagé ce parcours inspirant, vous respirez le bonheur et ça fait plaisir à voir.  Vous pouvez retrouver Erika sur son blog et son compte instagram.